Tchad : la justice menace de poursuites les journalistes enquêtant sur un massacre

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Le procureur de la République de N’Djamena a menacé de poursuites judiciaires samedi les journalistes ou acteurs de la société civile qui se rendent à Mandakao (sud-ouest du Tchad) sur les lieux d’un massacre en mai visant des éleveurs locaux.

Selon les autorités, 42 personnes ont péri dans ce massacre. Les victimes sont des éleveurs peuls dont majoritairement des femmes et des enfants, selon des sources locales.

« Certains journalistes et membres des sociétés civiles se permettent de se rendre, de leur propre initiative, à Mandakao (…) pour interroger certains habitants de ce village », a écrit le procureur Oumar Mahamat Kedelaye dans un communiqué.

Le 21 mai, l’opposant tchadien et ancien Premier ministre, Succès Masra, avait été placé en détention provisoire sur des accusations « d’incitation à la haine » à la suite du massacre de Mandakao.

Le chef du parti Les Transformateurs, et candidat malheureux à la présidentielle de 2024, avait été arrêté cinq jours plus tôt à N’Djamena.

« Compte tenu de la sensibilité de l’affaire, toute autre démarche parallèle (à la justice, ndlr) est susceptible de constituer un empiétement sur les fonctions judiciaires », écrit le procureur dans son communiqué, ce qui selon lui pourrait entraîner des « poursuites judiciaires ».

En mars, trois journalistes tchadiens avaient été arrêtés et placés sous mandat de dépôt à N’Djamena. Ils sont accusés d’avoir collaboré avec le groupe paramilitaire russe Wagner. Parmi eux figure notamment Olivier Mbaindinguim Monodji, directeur de publication de l’hebdomadaire Le Pays et correspondant de Radio France Internationale (RFI).

Les organisations de défense des droits humains s’inquiètent de ce qu’elles qualifient de vague de répression. La Fédération internationale des journalistes (FIJ) et Reporters sans frontières (RSF) ont appelé à la libération des journalistes et à un procès équitable.

Élu en mai 2024 dans un scrutin contesté, le président Mahamat Idriss Déby Itno a consolidé son pouvoir en décembre avec une majorité écrasante aux élections législatives et locales, boycottées par l’opposition.

Un contentieux entre des éleveurs peuls et des agriculteurs Ngambayes autochtones sur la délimitation des zones de pâturage et d’agriculture dans le village de Mandakao serait à l’origine du bilan meurtrier, selon une source locale.

Les conflits agro-pastoraux ont fait plus d’un millier de morts et 2.000 blessés entre 2021 et 2024, selon les estimations de l’International Crisis Group.

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