C’est l’histoire d’une querelle d’héritage comme en connaissent de nombreuses familles. Mais lorsque l’héritage en question est un fauteuil présidentiel, il ne s’agit plus d’une banale rivalité fraternelle.
Kpatcha GNASSINGBE a été un temps ministre de la Défense de son frère. En 2009, il est aaccusé de complot contre le président son frère. il se retrouve incarcéréer pendant près de quatorze ans, jusqu’à ce que son aîné finisse par autoriser son évacuation sanitaire, en mars 2023. Kpatcha Gnassingbé vit désormais au Gabon.
Une réelle affaire de complot ?
« Je l’ai nommé parce qu’il est compétent et parce que l’armée togolaise ne lui est pas inconnue. Cela se passe bien », justifiait le chef de l’État dans Jeune Afrique, en janvier 2007. L’entente ne dure pas. Octobre 2007 : la majorité présidentielle remporte les législatives. Candidat sous la bannière du Rassemblement du peuple togolais (RPT, au pouvoir) dans la préfecture de Kozah, dans la région de Kara, berceau de la famille Gnassingbé, Kpatcha est élu député. Deux mois plus tard, il est limogé du gouvernement sans motif. La machine s’emballe en 2009. Alors que Kpacha s’apprête à décoller pour une visite de travail en Chine, le président annule in extremis son voyage après qu’on lui a fait part de nouvelles inquiétantes : un coup d’État est en préparation. Et le cerveau du complot ne serait autre que son frère, Kpatcha.
Le soir de l’arrestation
Dans la nuit du 12 au 13 avril 2009, des unités d’élite fondent sur le domicile de l’ancien ministre de la Défense. Sa garde riposte et, pendant plusieurs heures, échange des tirs nourris avec les forces de sécurité. À en croire certaines sources, il faudra l’intervention d’un troisième frère, Rock Gnassingbé, chef de la division des blindés, pour extraire Kpatcha de son domicile. Il n’en sera pas moins arrêté deux jours plus tard devant l’ambassade des États-Unis, où il tentait d’obtenir l’asile.
Histoire de deux frères éduqués par le patriarche
Élevés dans les allées du pouvoir, les frères Gnassingbé gravissent les échelons sous la férule de leur père, militaire devenu président en 1967 à la faveur d’un coup d’État.
Faure obtient de prestigieux diplômes universitaires en France et aux États-Unis, passe par le ministère des Mines et dispense ses conseils financiers au patriarche.
Kpatcha fait ses classes au Royaume-Uni, prend la tête de la fructueuse Société d’administration des zones franches (Sazof) et siège au Conseil d’administration de la Société togolaise de coton (Sotoco).
Les deux frères se ressemblent peu. Faure se pose en réformateur. En 2005, il fait campagne sur le thème d’« une ère nouvelle pour le Togo ». Les idées de Kpatcha, elles, s’inscrivent davantage dans la lignée de celles de son géniteur, qui l’avait étroitement associé à la gestion de l’armée. « Je défends à 100% l’héritage de mon père. Il n’était pas contre la démocratie, mais il pensait qu’il fallait y aller doucement », confiait-il au journal Le Monde, en 2007.
Nelly BEHANZIN