Le président sénégalais a réuni ses ministres après que l’annonce du report des élections présidentielles a provoqué d’importants mouvements de protestation. Le monde politique bruisse de la possibilité d’une amnistie d’opposants.
Macky Sall fait face aux exhortations d’importants partenaires internationaux, de l’opposition et de la société civile. Ils l’invitent à renoncer au report au 15 décembre de l’élection initialement prévue le 25 février. Il est confronté aussi aux appels de ceux au Sénégal qui, pour ou contre le changement de calendrier, s’inquiètent du risque de tumulte et le pressent d’emprunter les voies de l’apaisement.
Le conseil des ministres s’est donc tenu sur fond de rumeurs d’amnistie. L’un des principaux candidats annoncés à la présidentielle de 2024, Ousmane Sonko, mais aussi son second à la tête du parti Pastef dissous, Bassirou Diomaye Faye, sont détenus depuis 2023. Sonko est présenté comme le principal bénéficiaire potentiel d’une amnistie. Mais le sujet n’aurait pas été abordé, selon une source proche de la présidence sous le couvert de l’anonymat. Un communiqué du conseil est attendu.
Macky Sall, élu en 2012 et réélu en 2019, a provoqué une véritable crise politique en annonçant le 3 février le report de la présidentielle, à trois semaines de l’échéance. L’Assemblée nationale a fixé le nouveau rendez-vous électoral au 15 décembre et prolongé le mandat du président Sall, censé expirer le 2 avril, jusqu’à la prise de fonctions de son successeur.
L’opposition crie au « coup d’Etat constitutionnel ». Les forces de sécurité ont réprimé les tentatives de manifestation. Des heurts ont fait trois morts. Il y a plus de 260 interpellations selon l’ONU, Human Rights Watch et l’opposition. Après une manifestation interdite mardi, des organisations de la société civile ont annoncé l’avoir reportée à samedi.
Ce qu’il faut retenir…
Les Etats-Unis et la France ont appelé le président Sall à tenir l’élection le plus rapidement possible. Les défenseurs des droits ont critiqué l’emploi excessif de la force et les restrictions au droit de manifester et à l’accès à internet. L’opposition soupçonne le camp présidentiel de s’arranger avec le calendrier parce qu’il est sûr de la défaite de son candidat, le Premier ministre Amadou Ba, désigné par Macky Sall pour lui succéder. Elle suspecte une manoeuvre pour que le président Sall reste au pouvoir, même si celui-ci répète qu’il ne se représentera pas. Le président a justifié le report par les vives querelles suscitées par le processus préélectoral et sa crainte qu’un scrutin contesté ne provoque de nouveaux accès de violence après ceux de 2021 et 2023. La présidence a publié sur les réseaux sociaux une vidéo en faveur d’un «dialogue national ouvert» en vue d’une élection «incontestable».