La brève rébellion armée orchestrée par Prigojine contre le Kremlin, pose la question de l’avenir du groupe paramilitaire dans l’environnement politique russe mais aussi en Afrique.
Le seigneur de guerre avait lancé ses mercenaires à la conquête de Moscou, le 23 juin 2023, avant de leur intimer l’ordre de se replier le lendemain. Depuis, Evguéni Prigojine est exilé en Biélorussie et un démantèlement de ses nombreuses activités a été lancé par les autorités russes. Le patron de Wagner s’est exprimé le 3 juillet sur l’une des chaînes Telegram de son groupe. « Aujourd’hui, plus que jamais, nous avons besoin de votre soutien. Merci pour ça. […] Je veux que vous compreniez que notre ‘Marche de la Justice’ visait à combattre les traîtres et à mobiliser notre société. Et je pense que nous y sommes parvenus en grande partie », a-t-il déclaré. Même s’il est d’ores et déjà présenté comme un traître à Moscou, Prigojine a assuré que ses mercenaires seraient bientôt de retour sur le front ukrainien.
La machine de propagande menacée
L’activité des comptes liés à Wagner a aussi considérablement chuté sur les réseaux sociaux. Wagner est connu pour ses mercenaires, mais le groupe est aussi spécialisé dans la propagande et l’influence médiatique. Grâce à de nombreux sites et à des équipes contrôlant des comptes sur les réseaux sociaux, Evgueni Prigojine a mis sur pied ces dernières années le projet « Lakhta ». Il s’agit d’un projet qui propose un ensemble de services numériques tels que l’ingérence dans les élections, la déstabilisation d’opposants et même l’entretien du sentiment anti-français en Afrique. Depuis le coup de force avorté, certains sites du groupe de Prigojine ont été bloqués par les autorités russes. Le 1er juillet, le nom de Wagner a même été retiré de l’immeuble qui abritait ses bureaux principaux à Saint-Pétersbourg.
Wagner sans le Kremlin : quel avenir ?
Les pays africains tels que le Mali et la Centrafrique sont sans doute des mines d’or pour les hommes de Wagner. Mais ces revenus sont-ils suffisants pour que le groupe continue à exister sans le Kremlin ? Le 27 juin, Vladimir Poutine révélait que Wagner avait touché près d’un milliard d’euros d’argent public entre mai 2022 et mai 2023. Il faut préciser que Wagner bénéficiait également du soutien logistique et matériel de l’armée russe. Difficile, donc, d’imaginer que le groupe de Prigojine puisse poursuivre pleinement ses activités sans le soutien du Kremlin.
La Russie sans Wagner : quel impact en Afrique ?
En quelques années, le groupe Wagner est devenu la forme la plus influente de l’engagement russe en Afrique. De manière assez schématique, plusieurs formes de sociétés existent dans la galaxie Wagner en Afrique. La première fournit des services militaires à des gouvernements aux abois en proposant des formations, des équipements et des combattants. Une deuxième qui consiste à fournir des services de conseil politique et d’influence. Une troisième chargée d’exploiter les ressources naturelles en contrepartie des « offres » politique et/ou militaires. Et, enfin, une autre division est chargée de proposer des services logistiques. C’est un commerce qui permet à la Russie de contourner les sanctions économiques de l’Union européenne. Le Kremlin aurait donc malgré tout besoin de Wagner pour conserver le terrain gagné en Afrique ces dernières années.
Le Mali et la Centrafrique peuvent-ils se passer de Wagner ?
Le colonel Assimi Goïta du Mali et le président centrafricain Faustin-Archange Touadéra, ont tous deux fait le choix des mercenaires du groupe Wagner pour sécuriser leurs régimes respectifs. Depuis la tentative de rébellion, les autorités maliennes et centrafricaines n’ont pas réagi ou remis en cause leur partenariat avec Wagner. Mais dans la nuit du 6 au 7 juillet, près de 600 mercenaires sur les 1500 présents à Bangui, sont rentrés en Russie. Au Mali, aucun rapatriement de troupes n’a été observé pour le moment.
Dorcas GANMAGBA
