Le Sénat kényan devait commencer mercredi l’examen de la destitution du vice-président Rigathi Gachagua, accélérant le processus vers sa possible révocation, au lendemain d’un vote de l’Assemblée nationale. Cette procédure inédite contre le n°2 de l’Etat, lancée le 1er octobre par un député de la coalition présidentielle, marque le point culminant de plusieurs mois de conflit entre le président William Ruto et son adjoint, au pouvoir depuis leur victoire à la présidentielle d’août 2022.
Le Sénat avait sept jours pour se saisir de ce dossier, mais l’a placé à l’ordre du jour de sa session de mercredi, quelques heures à peine après un vote de l’Assemblée nationale. Il doit désormais se prononcer dans un délai maximum de dix jours.
Mardi soir, les députés ont approuvé, par 282 voix sur 349, une motion demandant la destitution de Rigathi Gachagua sur la base de onze motifs dont ceux d' »atteinte à l’unité nationale », d' »insubordination » envers le président ainsi que de nombreuses suspicions de « crimes économiques » soit détournements de fonds publics, conflits d’intérêts, abus de pouvoir.
Rigathi Gachagua, 59 ans, a promis de se battre « jusqu’au bout » contre cette procédure qu’il a qualifiée de « pure propagande » et de « complot visant à (le) chasser du pouvoir », avec l’approbation du chef de l’Etat. Doté d’un solide réseau d’influence notamment dans la région stratégique du Mont Kenya, cet homme politique de l’ethnie kikuyu a joué un rôle crucial dans la victoire de William Ruto face à son rival Raila Odinga. Mais les relations entre les deux hommes à la tête de l’Etat se sont détériorées notamment depuis un mouvement de contestation antigouvernementale qui a secoué le pays en juin et juillet.
Les détracteurs de Rigathi Gachagua l’accusent de ne pas avoir soutenu le chef de l’Etat face aux manifestations qui demandaient sa démission. La répression de ce mouvement a fait plus de 60 morts. Le vice-président s’estime depuis mis à l’écart par le président, qui a en revanche commencé à se rapprocher du Mouvement démocratique orange, ODM de Raila Odinga.
En cas d’adoption, il serait le premier vice-président écarté du pouvoir via cette procédure, instaurée dans la Constitution de 2010. Mais il pourrait contester la décision en justice. En 1989, le vice-président Josephat Karanja avait démissionné dans des conditions similaires, avant un vote de défiance l’accusant de saper l’autorité du président Daniel arap Moi.